Comme je l’ai dit dans la toute Première Page sur ce Groupe, ELP pose un Problème, relatif à tous les Groupes de « Rock Progressif » : celui de l’Auditeur. Cette Musique est souvent très Riche, Musicalement, et Textuellement, et il est difficile de s’imprégner d’un Univers aussi Riche, un Univers qui supporte mal une Interprétation Personnelle de l’Auditeur, qui est martelé de Textes Précis, d’Images, de Symboles, de Morceaux à Tiroirs.

Ce n’est pas une Musique qu’on met comme ça, en fond Sonore dans une Soirée, c’est une Musique dont chaque Note est essentielle, si on tourne la tête 2 secondes, on rates quelque chose. Cette Musique demande une forte implication. Dans une Soirée, on peut mettre des Chansons calmes de Bjork, mais on ne peut pas mettre Tarkus, par exemple. C’est si complexe, si riche, que ça demande que l’on se pose tranquillement dans son lit, et qu’on écoute, qu’on profite de chaque seconde, sinon on rate le Solo de Guitare, d'Orgue ou de Batterie.


Ce n’est pas un Problème en soi, mais très souvent, on demande à une Musique de « passer partout », de s’adapter à l’Auditeur. C’est sans compter sur l’Ambition de ces Groupes (ELP, Yes, Genesis) qui sont là pour vous raconter une Histoire, mais peut-être pas que vous l’interprétiez à votre sauce. Genesis comprit cela lorsque le Groupe ne fut composé que de 3 Membres, en changeant sa Formule, et en racontant des Histoires, mais cette fois-ci, plus ouvertes, moins figées. L’Album Duke est un très bon Exemple. Il y a bien une sorte d’Histoire « Concept », mais chacun peut y voir ce qu’il veut.

Avec ELP, par chance, dans Tarkus, les Paroles sont plutôt accessibles, et on peut y voir plusieurs choses. Mais avec Karn Evil 9 ? Pas gagné… C’est pour ça que j’aime ELP, il y a pleins de Morceaux Instrumentaux, on peut voir ce que l’on veut. Autre chose : j’ai trouvé une Version de Karn Evil 9, mais avec un Orchestre de Cuivres, et c’est fou comme on se met à penser qu’Emerson a écrit Karn Evil 9 « inconsciemment » pour être jouée par un Orchestre de Cuivres. Aujourd’hui, Emerson joue encore sporadiquement, sors des Albums Solos, mais où est passé la Folie ?

Ce que j’aime (encore, et oui) dans la Musique d’ELP, c’est qu’elle n’est pas fermée, elle m’a ouvert sur pleins de Trucs. Rien que dans le Premier Album, ça donne envie d’aller voir du coté de Bartok, Janacek, Bach, The Byrds, des Trucs comme Simon & Garfunkel !


Dans Trilogy et le Jazz, c’est vers le Jazz, Copland, Ravel. Dans Pictures, c’est Mussorgsky, bien évidemment, mais aussi Jimmy Smith, Wild Bill Davies. Dans Brain Salad Surgery, c’est William Blake (Jerusalem) Ginastera, Monty Alexander, Tangerine Dream. J’en oublies pleins : Jelly Roll Morton, Mead Lux Lewis, Scott Joplin. J’aime cette idée d’un Groupe qui vous donne envie d’aller explorer des Rayons où vous n’aviez jamais mis les pieds auparavant. ELP est une Bonne Ecole pour ça. Ca fait déjà une Vingtaine de Mondes à Explorer !

La Musique d’ELP me fait rêver, certains y voient dans tout ce Bazar de Notes et d’Accords une Soupe Indigeste, Poussive. C’est pas faux, mais j’y voit aussi une Forme de Générosité, les Concerts d’ELP duraient plus de 2 Heures dans les Années 70. J’y vois un Musicien, Keith Emerson, jouant jusqu’au bout de son Délire, allant très loin, trop loin, jusqu’au point de non-retour, se brûlant les ailes, mais quelle beauté dans le geste ! ELP, en à peine 5 Années et Albums va au bout de son Idée, se ruine, se casse la figure, mais à réalisé son rêve. J’ai bien envie de citer Bjork : « Lorsqu’on mène une Vie comme ça, qu’on roule à 300 à l’heure, on ne ralentit pas, on explose ». Quelle Magnifique Explosion !


[ 30 Juin 2004 - E-Mail ]