[ Trilogie Kohntarkosz - Acte I - Kohntarkosz Anteria ]

Nous sommes en 1973. Le troisième album de Magma, Mekanik Destruktiw Kommandoh, a eu un succès monstre, la réaction du public a été plus que positive. Christian Vander cherche alors un nouveau souffle, pour ne pas tomber dans la redite. Il compose alors KA, qui est joué 2 ou 3 fois en concert.


Le KA de cette Epoque est alors composé des trois mouvements que l’on connaît aujourd’hui. Mais en composant KA, Christian Vander trouve très intéressant le thème qui ouvre le deuxième mouvement. Il lâche alors KA (a-t-il été enregistré en studio en entier ?) et entreprend Kohntarkosz. Ainsi découle le Kohntarkosz qu’on peut entendre sur le Live à la BBC de 1974, et qui comporte encore Om Zanka ainsi que le passage des Halleluyahs, provenant de KA. Puis finalement, en enregistrant Kohntarkosz en studio, le morceau change, et Om Zanka ainsi que les Halleluyahs passent à la trappe. Cependant, Om Zanka sera souvent joué lors des concerts de 1977, en tant que morceau isolé, et la majorité des morceaux de l’album « Inédits » (sorti en 1977) comporte des morceaux de KA (mais enregistrés à quelle époque ?).

A la fin des Années 90, un groupe appellé « Don’t Die » joue (avec beaucoup de classe) le répertoire de Magma. L’un des membres est alors approché par Christian Vander qui lui propose d’écouter les bandes de KA. Le groupe trouve alors le morceau fantastique et décide de le remonter. C’est ainsi qu’à cette période, Don’t Die interprétera les deux premiers mouvements de KA, ainsi qu’Om Zanka, individuellement, lors de leurs concerts. Ce qui me fait penser qu’il n’est pas dit que le KA de 1973 ait comporté de troisième mouvement finalement, et que ce troisième mouvement ait été concocté à partir d’Om Zanka, Gamma Anteria, ainsi que le passage des Halleluyahs…

Voici Kohntarkosz Anteria, qui raconte « La jeunesse tourmentée de Kohntarkosz en quête de sa destinée. Cependant, la providence guide déjà ses pas… » Ce que vous allez lire est mon interprétation de l'histoire racontée dans Kohntarkosz Anteria, je m’amuse à imaginer ce que peux raconter cet album, et il est tout à fait possible que je dise n’importe quoi.








[ Kohntarkosz Anteria - Premier Mouvement ]

N’oublions pas qu’à l’origine, Kohntarkosz raconte « l’histoire d’un type qui en faisant des fouilles découvre un tombeau que personne n’avait jamais trouvé avant ». On peut en déduire que Kohntarkosz est archéologue, où un passionné d’égyptologie qui décide de faire un voyage pour répondre à l’appel qu’il a reçu (celui d’Ëmëhntëhtt-Rê). Dans une interview, Christian Vander dit que le KA de 2004 devait débuter par une introduction parlée, ou un solo de batterie. A la place, il y a au début de KA ce magnifique chœur qui ouvre le bal, s’approchant du rebord. Ce Chant d’introduction, fantastique peut tout à fait être interprété comme la « providence » qui décide de guider les pas de Kohntarkosz.


Nous en sommes à un peu plus d’une minute de musique, et déjà, c’est le bordel, Magma nous entraîne dans un tourbillon de sensations, d’obsession aussi, avec ces couplets répétés en boucle pendant plus 30 fois, sans compter les chœurs qui chantent eux aussi, dans le fond, comme pour bien implanter le terrain, nous préparant peut-être à l’obsession qui viendra bien après dans Kohntarkosz. A 4 minutes commence le premier « vrai » couplet.

Difficile à interpréter, tant il est exempt de mots clés Kobaïens pouvant nous mettre sur la voie. Beaucoup de « Dowëri », comme le début de Kohntarkosz (le morceau du même nom, pas le personnage), et une impossibilité réelle à donner un sens « narratif » au début de KA. A 5 Minutes 18, Le nom de Kohntarkosz est prononcé, ça y est, il a été choisi.


On lit dans le livret beaucoup de Sündi ou de Sündë, qui veulent dire « reposer (en paix) » (comme sur le morceau « Coltrane Sundia » à la fin de l’Album Kohntarkosz, qui est même traduit par « Coltrane Rest in Peace » sur la pochette ou le livret). Est-ce une indication de la providence vers Kohntarkosz qu’il va rencontrer quelque chose qui « repose en paix » ? Probablement, d’ailleurs ce passage du premier mouvement est plutôt calme après la furie du début. C’est sans compter sur la suite, qui comporte des mots Kobaïens comme « Etnah » (Hérédité) « Zaïn » (Cerveau) « Dutsz » (« Ton ») et bien sur Hamtaï (Salut). Ces mots ne sont pas là par hasard, on sent que quelque chose sera transmis, et le mot clé est le dernier : « Hamtaï » (le sésame qui ouvre la pyramide, l’entrée du tombeau). Après ce passage, on entend des cris et des sifflements… Quelle signification narrative ? Probablement des cris plus forts que des mots, pour « réveiller » Kohntarkosz, qui est en « Sommeil » = Qui n’a pas encore reçu l’illumination. Après ces sons, on entend des « Steuh Leuhp » par grappes entières. Steuh signifie « Vers… ». Il est donc logique que les voix crient à Kohntarkosz d’aller « Là-bas » !

Ensuite, Kohntarkosz est interloqué, il réfléchit à ce qu’il vient d’entendre, et se laisse aller à la rêverie. C’est du moins comme ça que j’interprète le passage commençant à 8 Minutes 35, décoré de sons de flûtes (non crédités dans le livret, mais bien jouées sur scène, par Isabelle Feuillebois…), et se finissant par une sorte d’euréka lorsque retentit le « Wi Wi ! Do Weh Ro Weh Ro ! Wi Wi ! Doï Doï Himtï ! » qui annonce le Début du Deuxième Mouvement !

[ Kohntarkosz Anteria - Deuxième Mouvement ]

Le début du deuxième mouvement est annoncé par l’eurêka de Kohntarkosz qui semble entendre le « Hamtaï », le « Salut » qui ouvre le tombeau d’Ëmëhntëhtt-Rê. Ici, le motif musical ouvrant l’album Kohntarkosz est chanté, ce qui donne un autre aspect, une autre image que l’on se fait de la musicalité de la musique de Magma : le son devient chant, le chant devient son. Notons que dans le Hamtaï figure le mot « Nahnseï » qui signifie « pour toujours »… Magique. Commence alors un passage dont le but narratif n’est pas très clair, mais semble former une sorte de « chanson », avec couplet et refrain, les « Wi wi wowo sehndo » du chœur féminin renvoyant la balle aux paroles chantées par Antoine Paganotti.


Ce passage s’évanouit de lui-même vers une ambiance plus Calme, parsemée de « Sundï » (« Repose en Paix ») jusqu’à ce qu’un autre passage illuminé d’un solo de guitare de James McGaw.

Nous repartons de plus belle vers le refrain « Wi wi wowo sehndo » très optimiste du début de ce paragraphe, l’ambiance étant assez optimiste, comme si Kohntarkosz savait un peu où aller. On ressent bien ça dans les montées de chœur (de cœur ?) qui grimpent, qui grimpent, avant de reprendre le refrain « Wi wi wowo sehndo » qui nous est également servi de façon calme, puis plus violente, avant de basculer sur une sorte de conclusion où la voix de Christian est visible.

Toujours ce « Wi wi wowo sehndo » qui me rappelle le passage gospel de Wurdah Itah, « Blüm Tendiwa » (L’Ame du Peuple). Il est amusant de voir que le Peuple s’écrit « Blum », comme Léon Blum ? Revenons à KA : après ce passage operesque, nous entendons la berceuse de Kohntarkosz, annoncée par « Les Musiciens du Bord du Monde », phrase que l’on retrouve également dans l'album Wurdah Itah… Oui, c’est une Berceuse qui nous est chantée, du moins je la ressens comme ça. Kohntarkosz est sans doute bercé dans son sommeil par les voix angéliques qu’il entendra dans le Tombeau d’Ëmëhntëhtt-Rê.


Ces voix se font de plus en plus insistantes, montant d’un cran à chaque fois, avec encore ces « Sundï » qui invitent à dormir, enfin à reposer en paix. Puis, un passage contient des mots bien connus dans l’Univers Magmaïen : Da Zeuhl Wortz Mekanik (expression utilisée pour nommer le groupe Magma, que l’on peut traduire par « Les Musiciens chantant la Musique Céleste ») puis Zeuhl Wortz Kosmik (pareil, mais version cosmique). Apparaît alors le mot « Kobaïa », avant de conclure de façon définitive : Magma Iss Tendiwa, ce qui peut être interprété clairement comme « Magma EST l’Ame » où « L’Ame est dans le Magma » = L’Esprit est sous la Terre. Et qu’est-ce qui est sous la Terre ? Bingo : Le Tombeau d’Ëmëhntëhtt-Rê.

Comme pour renforcer cette évidence, la berceuse reprend, cette fois-ci parsemée d’Allëhluïa (Hallelujah) qui indiquent qu’une étape vient d’être franchie : on passe du stade de la découverte du tombeau (découverte physique) à la découverte de ce qui se cache dans le tombeau (découverte spirituelle) et qui est plus important que le tombeau lui-même. On entend durant ce passage des « Üii seï » que j’interprète comme des « Oh oui c’est lui (qui découvrira le Tombeau) » CRAC ! Tout à coup, un chœur menaçant scande des paroles qui nous réveillent de notre rêverie : il est temps de se mettre en route ! On entend alors deux « Döwatsïndoh » (ceux du passage gospel de Wurdah Itah) : un de Christian Vander (qui joue le rôle d’Ëmëhntëhtt-Rê voire pour cela le morceau « Hhaï » qui décrit Ëmëhntëhtt-Rê aux prises avec la maladie) puis un d’Antoine Paganotti, qui joue Kohntarkosz, acquiesçant l’appel d’Ëmëhntëhtt-Rê magnifié par cette montée incroyable de chœur !!! Et puis c’est le final du deuxième mouvement : Kohntarkosz se met en route. Il décide de parcourir le désert à la recherche du tombeau.

[ Kohntarkosz Anteria - Troisième Mouvement ]

Ce troisième mouvement s’ouvre par « Om Zanka », instrumental déjà entendu dans la version BBC 1974 de Kohntarkosz ou sur l’Album « Inédits ». Zanka signifie Soleil en Kobaïen. Le « Om » est surement le Om des Yogis qui méditent. On peut donc tout à fait voir dans ce passage une illustration du voyage de Kohntarkosz dans le désert, marchant vers le tombeau d’Ëmëhntëhtt-Rê que personne n’a découvert depuis l’Antiquité. Des pensées viennent à Kohntarkosz durant ce périple, illustrées par les voix venant ici ou là, ainsi que les percussions ou les flûtes. Le motif répétitif illustre à merveille ce difficile voyage où il faut encore et encore marcher tout droit, même si rien ne vient, en se basant juste sur sa foi, la foi en l’appel que Kohntarkosz a reçu.


Plusieurs « Kobalë » et « Kobalilëh » parsèment Om Zanka, je ne sais pas ce que cela veut dire. Un magique solo de clavier (merci Emmanuel Borghi) intervient à un endroit, solo par ailleurs bien plus réussi en live que sur la version album. Les voix reviennent, peut-être bien pour encourager notre Kohntarkosz qui doit lutter.

Pile à 9 Minutes, fini Om Zanka, nous arrivons à un Passage qui peut très bien ne pas être ce que je pense qu’il est : Kohntarkosz arrive à un village que personne n’avait jamais découvert. Le couplet très narratif chanté par Antoine à ce moment-là contient « Bradiaah » qui signifie « Parler ».


Plus que le « tombeau jamais découvert », on peut imaginer que Kohntarkosz découvre une vallée qui n’avais jamais été découverte avant, une vallée avec ce vllage que j'imagine, et c’est peut-être cela que découvre Kohntarkosz : plus qu’un tombeau : un pays (Kobaïa ?).. Peut-être que Kohntarksoz parle aux habitants de ce village de ce qu’il cherche. Peut-être que Kohntarkosz leur explique pourquoi il est là. Les villageois lui disent alors qu’ils attendent que l’éu vienne pour ouvrir le Tombeau, mais doutent que Kohntarkosz soient cet éu. A lui de leur prouver pour que les villageois le laissent entrer dans le tombeau.

Le passage situé vers les 10 Minutes illustre bien cela : c’est un dialogue permanent entre la voix de Kohntarkosz (Antoine) et les villageois (le chœur) : Le chœur ne fait que répondre « Hel hel » à ce que dit Kohntarkosz, qui décide d’aller vers le tombeau, malgré le refus des villageois, les « Töh ! » et « Söhn ! » scandés quatorze fois avec en fond une musique dont le style est très… rapide, comme dans l’urgence, comme si Kohntarkosz n’avait pas que ça à faire. A 11 Minutes 54, les villageois demandent à Kohntarkosz de leur prouver qu’il est bien l’élu, et ils le laisseront passer. C’est annoncé par le couplet arrivant à ce moment, qui contient lui aussi des « Sündi »… Une femme s’avance, et menace Kohntarkosz. Il ne pourra pas avancer si il n’est pas l’élu. Ecoutez donc ces « Maalëh Sün Dowi !!! » à 12:03 sublimement chantées par Himiko Paganotti…


Kohntarkosz répond à cette femme en parlant avec sa voix et celle d’Ëmëhntëhtt-Rê. Les villageois n’en croient pas leurs oreilles : la voix d’Ëmëhntëhtt-Rê sort de la Bouche de Kohntarkosz !

Puis le chant des villageois se fait plus doux : elles veulent entendre la voix d’Ëmëhntëhtt-Rê: c’est alors que commence un passage très optimiste, chanté par Christian, possédant le corps de Kohntarkosz l’espace d’un instant, revenant à la vie à travers la musique. Les Villageois doutent. Est-ce un tour de Magie ? Non, Ëmëhntëhtt-Rê est bien là, sous leur yeux, et Kohntarkosz est là pour le rencontrer.


Il peut entrer dans le tombeau sous les acclamations de la foule, se réjouissant que l’élu soit enfin arrivé. La foule s’amasse, lui chantant jusqu’à l’épuisement des louanges (Allëhlüïa) qui deviennent une transe, préparant Kohntarkosz à son voyage spirituel. Allëhlüïa, Allëhlüïa, Allëhlüïa, l’éspace n’est rempli que de ça. Kohntarkosz a peur de ce qu’il va découvrir, mais les Allëhlüïa forment autour de lui une seconde peau, une protection contre ce que contient le tombeau (la poussière accumulée là depuis des siècles). Kohntarkosz se sent alors peu à peu plus confiant, et marche vers l’éntrée du tombeau. Son cœur bat à tout rompre, les Allëhlüïa l’obsèdent, rentrent dans sa tête, vidant tout son ésprit de mot, de raison, de logique : il doit entrer dans le tombeau, et ne pense à rien d’autre que ça. Il n’y a plus de présent, plus de passé, plus de futur. Kohntarkosz entre dans le tombeau, les villageois n’osent pas le suivre et restent dehors à l’acclamer, à l’encourager.


Il parcours une bonne centaine de mètres dans le noir, s’enfonçant dans le tombeau Les Allëhlüïa s’estompent un peu derrière lui, mais Kohntarkosz a toujours sa seconde peau pour le protéger. Il avance seul dans le noir et tend sa main dans l'obscurité, sachant à l'avance ce qu'il va toucher. Devant lui, il sent la porte du tombeau.

Il a trouvé ce qu’il cherchait. Il ne bouge pas, ouvre les yeux dans le noir, panique un instant, le temps de dilate, les Allëhlüïa ralentissent, puis une voix dans le néant semble lui parler directement dans sa tête : « Sois le bienvenue » (Hoï Hamtaï Sïm Rïm Hamtaï). Kohntarkosz entend alors le Sésame. Il s’apprête à pronconcer le Salut : Hamtaï…


La suite est le début de l’album Kohntarkosz, dont la version studio ne possède malheureusement pas ce fameux sésame scandé par Kohntarkosz (en live par Klaus Blasquiz) pour que la porte s’ouvre. En cliquant sur le lien à la fin de ce paragraphe, vous arriverez vers la page où je parle du deuxieme mouvement de cette trilogie : Kohntarkosz !

[ Suite : Acte II - Kohntarkosz ]