Il y a toujours quelque chose contre quoi râler. Aujourd’hui, j’ai envie de râler, pester et vomir sur une manie peut-être très répandue, peut-être pas, mais qui m’ennuie.

Elle débarque avec ses gros sabots, et ce, que l’on discute de Musique, de Cinéma, de Théâtre, de Films, de Livres, de tout ! Vous abordez une Œuvre avec un interlocuteur, et soudainement, alors que vous commencez à esquisser les impressions ressenties lors de cette Œuvre, c’est là que vous vous effondrez. L’interlocuteur dit « La fin est bien » (remplacez bien par ce que vous voulez : pas bien, décevante, rigolote, nulle etc).

Pourquoi cette manie de tout considérer par la Fin ? La Fin est une étape de l’œuvre, mais elle n’est PAS l’œuvre, non ? Souvent, tout est centralisé autour de ça. Bien entendu, pour se régaler et trouver pleins de comportements similaires, il suffit de se promener sur des Forums de Films dédiés aux Films qui ne jouent que sur cet effet « Final », c’est à dire que presque toute la vision et l’appréciation du Film est réduite à ce que l’on a éprouvé lors de la fin. On parle de « pirouette finale » ou de « queue de poisson » ou encore de « porte ouverte » . Tout ce par quoi on est passé dans l’œuvre est soudainement mis à la trappe suivant l’impression que nous a donné la Fin.

Comportement étrange, que moi-même je partage quelque fois, tant on a une trop forte attente quand on est en plein dans un Film (ou un Album) et qu’on se dit « La Fin, elle va sûrement être sublime… ». Je me souviens qu’après avoir lu le Monde de Sophie j’étais fort déçu par la Fin, et ceci influa un moment sur la Considération que j’ai pour ce Livre, car Foutriquet de Framboise, après nous avoir emmené loin dans son Univers, Sophie et Roberto nous laissent en plan comme de vulgaires chaussettes ! Puis, en y repensant, même si la Fin est un peu « facile » (dans le sens « j’en attendais plus, j’en voulais plus, je voulais une explication » - autre comportement étrange peut-être) je me suis mis à repenser à l’intégralité du Livre, et le plaisir revient, la déception s’en va.

Ca fonctionne aussi avec des Films ou des Albums dont j’ai grandement apprécié la fin. La Fin du Voyage de Chihiro est un bon exemple, car ce n’est pas une Fin posée là pour faire joli, pour faire une Pirouette ou pour « augmenter une réalité donnée », non, c’est une Fin tout ce qu’il y a de plus classique. Le Conte est fini, on se réveille, et on repense aux grands moments du Conte en rêvant les yeux ouverts. Les Noiraudes (avec la Musique au Piano qui va avec, Merveilleuse) le Travail aux Bains, le Vol du Dragon avec ses écailles qui s’envolent dès que Sen lui rappelle son Nom. Pourquoi la Fin d’un Album ou d’une Chanson serait-elle plus importante que tout ce qui s’y passe au début, au milieu, et aussi un peu avant la Fin ?

Pour la Chanson, j’ai un bel exemple, avec « The Windmills in Your Mind », reprise par Dorothy Ashby. Un Titre que je trouve sublime d’équilibre : chaleur du rythme, de la Basse, et en même temps, fraîcheur des sonorités de la Harpe, de la mélodie plutôt triste et froide, et ces violons qui lancinent de haut en bas avec interventions à la Flûte et la Clarinette. Cette Chanson ne s’arrête jamais, elle trotte dans la tête, mais la Fin me déçoit à chaque fois. Etrange hein ? Peut-être j’aurais mis un Fade Out en gardant la même trame que toute la Chanson. Enfin tout ça pour dire que Nom d’une Pipe en Bois, pourquoi est-ce qu’on attache tant d’importance à la Fin plutôt qu’au Début ou au Milieu ?


[ 25 Janvier 2004 - E-Mail ]